Zoom sur le paysage

Œuvres des collections des Abattoirs,

 Musée – Frac Occitanie Toulouse

 

Avec les artistes : John Batho, Ali Cherri, Hervé Crépet, Olivier Debré, Jean-Bernard Durupt, Yohann Gozard, Suzanne Husky, François Malbreil, Fleur Noguera, Carlos Uribe


Collections les Abattoirs, Musée – Frac Occitanie Toulouse
Collections les Abattoirs, Musée – Frac Occitanie Toulouse

JOHN BATHO 1939, Beuzeville (Eure, France) Vit et travaille en Normandie L'étang, l'eau verte et bleue de la série Giverny, comme une peinture déjà faite, 1983, cibachrome.

John Batho est reconnu pour son utilisation de la couleur en photographie dès les années 1960. L’étang, l’eau verte et bleue est le cliché d’un étang, probablement celui du jardin de Monet à Giverny où l’artiste et son épouse se sont rendus à plusieurs reprises. Le mélange de bleu et de vert sur fond noir donne une sensation de flou, accentuée par les effets de vibration de la lumière. La combinaison de ces éléments provoque une sensation de matière conférant à l’image un fort caractère pictural, transformant la photographie en un tableau impressionniste. Cette photographie illustre les recherches de l’artiste, le sujet n’étant pas réellement l’étang en lui-même mais davantage toutes les nuances, les réverbérations lumineuses qui le traversent et qui sont à l’origine de la sensation visuelle opérée.


 

 ALI CHERRI est un vidéaste et artiste plasticien libanais vivant entre Beyrouth et Paris. 

 

Ali Cherri est un vidéaste et artiste plasticien libanais vivant entre Beyrouth et Paris. Il appartient à cette génération d’artistes libanais nés pendant la guerre civile et dont la pratique a été fortement marquée par ce contexte d’instabilité. Dans Wild Life, il photographie la reconstitution d’un écosystème sous lumière artificielle à l’Arabian Wildlife Center de Sharjah (réserve naturelle animale du désert de Sharjah des Emirats Arabe Unis) et questionne la légitimité et pertinence des reconstituions d’environnement par les humains et leur subjectivité. Il dit à propos de Wild Life que c’est «Un spectacle angoissant brouillant la limite entre le naturel et l’artificiel, ce caisson lumineux est une fenêtre ouverte sur un monde mystérieux. La nature sous forme de “nature morte”, cette scène d’une réserve naturelle montre l’œuvre de l’homme comme création “ contre nature”.»


 

HERVÉ CRÉPET 1949, Montbrison (Loire, France) Vit et travaille à Aurillac

Hervé Crépet est fasciné par l’écoulement et le passage du temps. Cette œuvre de 1986 représente un arbre sur un mur. Mais il s’agit de son ombre portée coloriée directement sur le mur par l’artiste lui-même. Une ombre qui n’existe déjà plus au moment de la prise de vue, l’image de ce graffiti est l’empreinte de cette vision fugace. «Crépet travaille en plein air, au jour, avec le soleil, maître des ombres. Il colorie sur le sol, sur le mur… l’ombre de son sujet que ce dernier soit arbre, fleur ou humble palissade… une fois sa “peinture” (rapidement délimitée) achevée, il photographie “ l’objet ”, son coloriage et sa nouvelle ombre portée qui a fui, comme la grande aiguille de la montre dépasse celle qui indique les heures.» - Michel Quétin.


OLIVIER DEBRÉ 1920, Paris (France) - 1999, Paris

 

Olivier Debré est l’un des représentants de l’abstraction gestuelle. Dépouillé de toute anecdote, l’essentiel de son œuvre est une peinture d’espace et de lumière. En 1996, il répond à une commande de la ville de Toulouse à l’occasion du deuxième festival Garonne. Pendant trois jours, Debré s’installe au Port Viguerie pour y peindre la série Suite Garonne. À son propos, il déclare «Je me défends d’être paysagiste, je traduis l’émotion qui est en moi devant le paysage». Par des moyens restreints mais virtuoses (grandes plages de couleur, empâtements nerveux, coulures, jeu de glacis…), Olivier Debré arrive à transmettre les sensations qui l’ont animé à la contemplation du fleuve. 


JEAN-BERNARD DURUPT 1952, Nancy (Meurthe-et-Moselle, France) Vit et travaille à Nancy

 

Jean Bernard Durupt divise son temps de travail entre la gravure sur bois et la peinture à l’acrylique. Ses recherches l’ont amené à modifier sa technique mais l’inspiration reste toujours la même : le paysage. Cette estampe a peu de couleurs à l’impression : le blanc du papier envahissant, devient le lieu de rendez-vous d’autres supports graphiques : crayons de couleur, crayons aquarelle, feutres, pastel gras, gaufrages… Le résultat de cette entreprise est une invitation constante à pénétrer dans les images. Le spectateur y est appelé par des titres concis et souvent poétiques, écrits sur le côté des œuvres, intervenant comme une voix off.


YOHANN GOZARD 1977, Montluçon (Allier, France) Vit et travaille à Sète

 

Les espaces urbains délaissés sont le terrain privilégié du travail photographique de Yohann Gozard. Gares, échangeurs routiers, hangars à l’abandon etc., sont invariablement saisis de nuit par l’artiste. La série des Wonderpools, débutée en 2006, poursuit cette investigation nocturne des zones périurbaines, en saisissant, auréolées des lumières des projecteurs publicitaires, d’imposantes piscines à coque plastique dressées à la vue. Le titre fait tout à la fois référence à l’objet (une «swimming pool») et à son fort pouvoir d’attraction et d’émerveillement (Wonder) sous les lumières artificielles qui les éclairent jusque tard dans la nuit. Ainsi posées aux milieux de parking désertés, les coques forment d’étranges sculptures aux allures d’Henri Moore minimalistes, incroyablement majestueuses sous le regard précis de Gozard.


SUZANNE HUSKY 1975, Bazas (France) Vit et travaille à Bazas (France) et à San Francisco (États-Unis)

 

Dans La Noble Pastorale, l’artiste pluridisciplinaire Suzanne Husky reprend la composition de la plus mystérieuse tapisserie de La Dame à la licorne: Mon seul désir. Toutefois aux personnages centraux – la dame, sa servante, le lion et la licorne – l’artiste substitue un bulldozer et une militante éco-activiste. La scène pastorale médiévale laisse place à une réflexion sur les enjeux environnementaux et politiques contemporains. Comme dans le reste de son œuvre, Suzanne Husky questionne ici la globalisation, les rapports entre nature et culture mais aussi et surtout le lien rompu entre la société contemporaine et son environnement. La forme de cohabitation entre l’humain et la nature présentée dans La Dame à la licorne est-elle une manière de regarder différemment notre propre rapport avec cette nature?


FRANÇOIS MALBREIL 1953, Versailles (Yvelines, France) Vit et travaille à Toulouse

 

Les voyages de François Malbreil sont l’occasion pour le peintre de réaliser de nombreux croquis puis des huiles sur toile. Lors d’un de ses voyages aux îles Canaries, il découvre, au milieu du paysage désertique de l’île Lanzarote, un ensemble d’habitations de forme cubique abandonné qui lui inspire cette œuvre de La maison abandonnée. Derrière l’apparente légèreté de la forme et du sujet, ce paysage nous laisse l’étrange sensation d’une réalité troublée. L’absence de présence humaine et l’épuration des formes ne retenant que les lignes nettes, cantonne ses tableaux à un monde ordonné, figé, qui laisse penser à un décor où réel et imaginaire s’imbriquent étroitement. 


FLEUR NOGUERA 1972, Belfort (Territoire de Belfort, France) Vit et travaille à Barcelone

«Le titre du film Devonian Levels fait directement référence au lieu du tournage et au système géologique dévonien rattaché à l’ère primaire pendant laquelle l’Amérique du Sud connut un développement très important de sa faune et de sa flore. À la manière d’une exploratrice, Fleur Noguera rapporte de son séjour en Argentine un exercice cinématographique composé d’une succession de plans en contreplongée, gros plans et vues panoramiques évoquant une nouvelle géographie. Le film sous des allures d’archives offre un montage sans effets, une transition par la couleur et la lumière, une véritable logique réinventée oscillant entre science naturelle et projet d’excursion géologique.» Arlène Berceliot Courtin.


CARLOS URIBE 1964, Medellín (Colombie)

Horizontes (1913) du peintre colombien Francisco Antonio Cano (1865-1925). Cette peinture très connue célèbre le centenaire de l'indépendance. L’œuvre de Cano représente un paysan et son épouse, montrant du doigt au loin la terre d’Antioquia sur laquelle ils s’apprêtent à s’installer. Elle est représentative des vertus de l’extension du territoire, l’ancrage de la terre et le respect de la tradition et de la famille. Carlos Uribe répond à cette œuvre iconique par Horizontes 1999, une reproduction numérique de l’original où le couple pointe, cette fois, un avion du gouvernement versant des produits chimiques sur des plantations illégales de coca et de marijuana. L’artiste dresse ainsi un parallèle ironique entre la colonisation des terres colombiennes au XIXème siècle, et l’expropriation des fermiers par de grands propriétaires sur fond de trafic illicite.